Coup de coeur album -Le berger et l’assassin, le nouvel album humaniste et puissant de Henri Meunier et Régis Lejonc

  • Publication publiée :18 février 2022
  • Post category:Albums

Une fois de plus, Henri Meunier et Régis Lejonc conjuguent leurs talents et composent à quatre mains un album puissant. Edité par Little Urban, Le berger et l’assassin est un récit de montagne, humaniste, redoutablement bien écrit, aux illustrations spectaculaires.

Le récit

Lumière du soir sur les flancs d’une montagne aux pentes raides, les versants rougeoient. D’une maison – que l’on ne voit pas – s’élève un dialogue. Un berger – que l’on ne voit pas – est en train de retirer les balles du corps d’un assassin – que l’on ne voit pas. L’assassin est arrivé des « abîmes », poursuivi par les fascistes. Le berger l’accueille, le soigne. Entre les deux hommes, pas de pathos. Ils cohabitent d’abord à coups de silences et de mots intransigeants. L’assassin est en colère, révolté.

Combattant, il n’est l’ami de personne et surtout pas du berger ; pour survivre, il doit passer la montagne. L’autre impose son rythme de montagnard, calme, ferme, sans jugement, il ne trahira pas, ni le fugitif, ni la montagne. Il guidera l’assassin jusqu’à l’autre côté, mais c’est à la montagne de décider quand.

Entre ces deux hommes, il faudra du temps. Des nuits, des levers du jour, des couchers de soleil. Il faudra du temps pour que les rôles s’inversent, il faudra que l’assassin devienne celui qui soigne. Il faudra que la montagne prenne plusieurs nuances, jusqu’à permettre aux pas de s’emboîter et que le projet devienne commun. « Demain, nous ferons cordée ».

Le coup de cœur

Lorsque cet album des éditions Little Urban est entré chez nous, son grand format nous a stupéfaits. Et à l’intérieur, tout était beau à couper le souffle. Le texte, les dessins, l’histoire, les personnages.

Au cœur de la montagne – celle de l’enfance de Régis Lejonc, à La Tournette, près du lac d’Annecy – Henri Meunier façonne un récit incarné par deux personnages courageux et intègres. Au berger, il donne l’esprit de la montagne, le sens de l’entraide et l’humilité de ceux qui n’envisagent pas de dominer la nature mais qui font corps avec elle dans le plus grand respect. L’assassin, lui, est le maquisard, le résistant, celui qui se bat pour ses idées, en bas, dans la vallée.

Cette rencontre résonne dans les dessins grandioses de Régis Lejonc, inspirés de ses souvenirs d’une partie de son enfance vécue au pied de ces « rocheuses ». Les vues se succèdent, magnifiques, épousant les évolutions de la narration. Elles sont claires quand les hommes y voient clair. Elles s’assombrissent lorsque la menace pèse. Et il y a cet incroyable parti pris de ne jamais montrer les personnages. Sauf une fois. Le dessin nous « cueille » en fin de récit, les deux hommes sont là, devant nous, encordés, unis dans un destin commun.

C’est une lecture à accompagner. On parlera de la montagne, des hommes, de leurs choix. On pourra évoquer l’Histoire, les justes et les résistants. Peut-être que la conversation nous emmènera du côté de la vallée de la Roya ou en Méditerranée où les marins n’abandonnent jamais personne. Ce qui est sûr, c’est que Le berger et l’assassin nous guidera du côté de l’humanité •

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