oulipo = ouvroir de littérature potentielle. Invention de Monsieur Queneau, poète et de Monsieur Le Lionais, mathématicien. C’est dire l’étrangeté de la chose. C’est dire l’ingéniosité de l’affaire. Nous sommes en 1960. Afin de dépasser les limites de la création poétique et littéraire, les deux hommes décident de s’imposer des contraintes
Le Petit Oulipien – Rue du Monde – Prix 16,50€
Des contraintes pour être plus libres ? Par le truchement de la limite, nous devenons si inventifs que les bras nous en tombent. Bref, en 1960, la cause est entendue, l’Oulipo fait des émules, et parmi eux, les plus géniaux , Italo Calvino, Robert Desnos, Georges Perec, Marcel Duchamp.
Derrière ces airs savants, l’Oulipo est aussi ludique que fécond. Fabriquer des tautogrammes, des lipogrammes, faire du monovocalisme ou des terines (un seul r, selon l’orthographe oulipienne), jouer avec l’homosyntaxisme, cuire le langage, c’est tout bonnement excitant. Bien sûr, ça vous bouscule les neurones et ça vous chamboule la logique, mais les effets sont étincelants, hors-normes.
L’Oulipo est quinquagénaire, voire plus. Il a fêté son Vème millénaire (en oulipien, une année vaut un siècle) en 2010, en grandes pompes. L’Oulipo n’a en effet pas faibli. Sachez que les rendez-vous mensuels initiés par les créateurs du mouvement n’ont jamais cessé. Chaque mois, les poètes se retrouvent afin de se livrer à des acrobaties syntaxiques. Chez Rue du Monde, l’anniversaire a été marqué par la publication du Petit Oulipien, une anthologie de textes de l’Oulipo réunis par Paul Fournel. Les contraintes sont expliquées, puis illustrées par des morceaux choisis émanant d’oulipiens d’hier et d’aujourd’hui. L’idée derrière la tête ? Chatouiller la créativité afin que le jeune lecteur fasse le pas et se lance à langage perdu là où il n’est jamais allé.
L’apprenti oulipien sera sans aucun doute inspiré par les traces visibles laissées ça et là. A Rennes, les oulipiens ont fixé des mots ou parcelles de phrases dans des clous. Par beau temps, tout en sillonant l’esplanade Charles de Gaulle, on est poète.
Aux Champs-Libres, les étudiants en design graphique de Lisaa ont digressé autour du vocabulaire de la bibliothèque. Ils ont apposé leurs exercices de styles visuels sur les vitres. Ici, il faut deviner la contrainte et chercher ce qui a produit ces étrangetés et ces fulgurances.
Car lorsqu’elle est ni poétique ni littéraire, la contrainte peut être graphique, théâtrale, musicale… Le champ oulipien est si vaste que personne n’en a jamais vu la fin. Ouvroir infini. Comme les paysages du Printemps des Poètes, qui se célèbrent en ce moment et auxquels nous venons de rendre hommage.
Illustration Julia Perrin © Printemps des Poètes
Merci pour le lien… Les étudiants de lisaa & moi
Miam, miam miam…